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Flouve odorante (Anthoxantum odoratum) une plante méconnue

Plantes sauvages dans cet article: 

Thèmes: 
Michaël Berthoud
/
10 mai 2024

La flouve odorante est une petite graminée qui vaut le détour. Ce foin odorant offrira au cueilleur averti une belle odeur de vanille, douce et puissante à la foi, et qui servira à parfumer de nombreux plats.

Flouve odorante
Foin odorant
Nom latin : Anthoxantum odoratum L.
Famille : poacées (graminées)
Cueillette : fruits de septembre à novembre, racines en automne et hiver
Parties utilisées : tige avec feuilles et les épis
Milieux : pâturages, prairies, bas marais
Floraison : avril à juin

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La flouve odorante est une plante sauvage de la famille des poacées, autrement dit une graminée. C’est une plante très commune dans les prairies et les pâturages. C’est même la troisième plante la plus signalée à InfoFlora (centre de botanique suisse), elle est présente dans plus de 90% du territoire (93% des carrés de 5x5km) [1]! Cela signifie que c’est une plante à large amplitude écologique. C’est également une plante présente un peu partout sur terre, des États-Unis à la Nouvelle-Zélande, où elle présente fréquemment un caractère invasif [10].

Carte de répartition de la flouve odorante, Anthoxantum odoratum [10]. Les points ne sont pas exacts, ils sont généralement au centre d’un carré d’une maille. La plante peut donc être tout autour d’un point. Cette carte est utile pour voire la répartition générale de l’espèce.

Malgré cette large présence, elle reste méconnue du grand public et des milieux de la cueillette. Une recherche sur les moteurs de recherche ou sur Youtube se révèle vite décevante pour celui ou celle qui désire en savoir plus sur cette plante et l’utiliser.

La flouve odorante est une graminée et les espèces de cette famille ne sont pas des classiques de la cueillette, car la plupart n’ont pas de goût particulier et ne sont pas très charnues. De plus, elles sont difficiles à déterminer.

La flouve fait exception puisqu’elle fait partie de nos 3 plantes principales à coumarine avec l’aspérule odorante et les mélilots. La coumarine est une molécule conférant aux aliments un délicieux goût de vanille.

Flouve odorante dans un prés.
Flouve odorante dans un prés.

Reconnaître la flouve odorante

Pour reconnaître la flouve odorante, une bonne flore sera nécessaire, ainsi que l’utilisation de sites comme Infoflora ou TelaBotanica. Voici quelques conseils.

Elle fleurit relativement tôt dans la saison au printemps, généralement avant les autres graminées, avant que les herbes soient très hautes. Il ne faut donc pas trop tarder pour partir à sa recherche.

Les graminées possèdent des fleurs appelées épillets souvent disposées en forme d’épi (se sont des épis d’épillets). Chez la flouve, il s’agit plutôt d’une panicule, qui est en fait une grappe de grappes. Chaque épillet se trouve donc au bout d’une petite ramification que l’on appelle pédicelle. Ceux-ci sont très cours, si bien qu’on ne les remarque presque pas. C’est juste assez pour donner un aspect hérissé à la panicule.

Cette inflorescence est moins dense que chez d’autres graminées et souvent lavée de pourpre. Les étamines formant de petits satellites en forme de chromosomes pourpres gravitant autour de l’inflorescence. Vous observerez aussi de petits filaments blancs, favorisant cet aspect ébouriffé. Il s’agit des stigmates des fleurs femelles.

Les feuilles présentes sur la tige sont petites, elles sont larges de 3 à 7mm. Elles possèdent une particularité, une sorte de petite échancrure de part et d’autre du limbe. À la base de la feuille, sa ligule est velue.

Finalement, on remarque que sa tige est coudée et que ce coude est généralement de couleur pourpre (sauf quand elle est jeune).

Confusions

Il existe quelques graminées toxiques comme l’ivraie enivrante, Lolium temulentum, rare en France et en Suisse et l’avoine dorée, Trisetum flavescens, plus commune (qui n’est pas l’avoine cultivée). La première possède des épis pouvant faire 30cm de longueur [8] et la deuxième une panicule pouvant faire 20cm de longueur [6]. Dans les deux cas, l’inflorescence est beaucoup plus longue que chez la flouve odorante qui fait 2 à 8cm [9].

Cuisiner la flouve odorante

La cueillette de la flouve se fait dès qu’elle apparait en mars jusqu’en juin-juillet selon l’altitude et la région. C’est au printemps, avant la première fauche ou avant l’arrivée du bétail que nous la récoltons. Elle est tellement abondante, c’est d’ailleurs une vivace aux fortes racines, que la cueillette ne pose normalement pas de problème.

Cette odeur de coumarine est un délice. En pleine nature, récoltez un brin de flouve, mettez-le dans la bouche, mâchouillez et vous sentirez un délicieux goût de vanille flatter vos papilles. C’est une plante que l’on peut utiliser comme l’aspérule ou le mélilot pour parfumer ou embaumer vos plats.

Pommes de terre en papillote à la flouve odorante.
Pommes de terre en papillote à la flouve odorante.

On utilise le tout: tige, feuilles et inflorescences, fraiches ou sèches. Une manière facile et efficace de la cuisiner est la papillote. Une poignée grossièrement hachée, pour pouvoir l’enlever par la suite, suffit. Les pommes de terre cuites en papillote à la flouve sont un véritable voyage gustatif. De la même manière, les viandes peuvent être parfumées ou même fumées avec ce délicieux “foin odorant”, que ce soit au fond de la casserole ou bien directement sur les braises.

Viande fumée à la flouve.
Viande fumée à la flouve.

La fumée qui s’en dégagera ne laissera personne indifférent! On peut donc également l’utiliser comme encens naturel, comme le font les peuples premiers d’Amérique du Nord avec le foin d’odeur.

Finalement, ou pourra parfumer toutes sortes de boissons et de desserts, à la manière de l’aspérule odorante: vin de mai, crèmes brûlées, pana cotta, etc…

Flouve odorante, foin d’odeur et herbe à bison: pareil?

Parmi les graminées, il existe une autre plante à coumarine, avec parfois quelques confusions de noms.

L’herbe à bison, Hierochloe odorata, est une plante qu’on appelle aussi foin d’odeur. C’est une plante présente en Amérique du Nord ainsi qu’en Eurasie, mais plus au nord que la Suisse et la France (Nord de l’Allemagne, Scandinavie, Sibérie)[2]. C’est avec cette plante que l’on produit la vodka Żubrówka et elle est utilisée comme encens par certains peuples amérindiens.

Toxicité de la flouve odorante

Tout comme pour le mélilot, on rapporte des cas d’intoxication du bétail. Dans certaines circonstances (ensilage et enrubannage du foin), la coumarine contenue dans la flouve et le mélilot peut être transformée par une contamination fongique (Aspergillus) en dicoumarol anticoagulant [3]. La plupart des cas ont lieu aux États-Unis et en Grande-Bretagne et l’on reporte un cas en Australie où du bétail a été nourri par du foin enrubanné contenant plus de 90 % de flouve odorante.

Je n’ai trouvé aucun cas d’intoxication chez l’homme, mais on prendra tout de même certaines précautions (voir plus bas).

Concernant la plante fraiche ou correctement séchée, on mentionne une possible toxicité de la coumarine prise à haute dose: formations de tumeurs, problèmes hépatiques et pulmonaires. Comme nous l’avons écrit dans l’article sur l‘aspérule odorante, les études portent sur les rats et il a été démontré que la coumarine ne prend pas le même chemin métabolique chez l’homme. Il est donc conclu que l’exposition à la coumarine contenue dans les produits alimentaires et cosmétiques ne présente aucun risque pour la santé humaine [5].

Cependant, comme c’est une plante peu utilisée et peu documentée, nous conseillons de la consommer avec modération et d’éviter les grosses quantités, principalement dans les boissons.

En résumé, 4 recommandations

  1. Si l’on désire conserver la plante, il convient de bien la sécher. On évitera d’en faire un gros tas: ne pas reproduire ce qui se passe dans un ensilage ou une balle de foin, où l’herbe verte est compressée sans oxygène et où la température monte.
  2. Tout comme pour l’aspérule odorante ou le mélilot, elle devra être jetée si elle noircit au séchage.
  3. On évitera d’en faire des fermentations qui font intervenir des souches d’Aspergillus comme les misos japonais (ceci est très particulier et ne concernera que les spécialises de ce domaine).
  4. On évitera de la consommer en grande quantité.

Les informations données ici peuvent ne pas être suffisantes pour déterminer ou utiliser une plante avec sécurité. N’oubliez pas, au moindre doute, abstenez-vous ! Faites-vous conseiller par un guide professionnel, achetez de bons ouvrages de référence et utilisez les applications de reconnaissance par photographie avec discernement. Sachez que nous organisons des cours sur les plantes sauvages comestibles, médicinales et toxiques régulièrement.

Références

[1] FloraCH, Le magazine botanique suisse, N°19, Édition spéciale 2024, page 5.
[2] GBIF, Hierochloe odorata (L.) P.Beauv. Consulté le 7 mai 2024.
[3] Jean Bruneton. Pharmacognosie, Phytochimie, Plantes médicinales. 2016. Lavoisier Tec & Doc.
[4] Runciman DJ, Lee AM, Reed KF, Walsh JR. Dicoumarol toxicity in cattle associated with ingestion of silage containing sweet vernal grass (Anthoxanthum odoratum). Aust Vet J. 2002 Jan-Feb;80(1-2):28-32. doi: 10.1111/j.1751-0813.2002.tb12041.x. PMID: 12180874.
[5] B.G Lake, Coumarin Metabolism, Toxicity and Carcinogenicity: Relevance for Human Risk Assessment, Food and Chemical Toxicology, Volume 37, Issue 4, April 1999, Pages 423-453
[6] Trisetum flavescens (L.) P. Beauv., © 2022, Konrad Lauber – Flora Helvetica – Haupt Verlag
[7] Anthoxantum odoratum, TelaBotanica.
[8] Lolium temulentum L. InfoFlora
[9] Anthoxantum odoratum aggr. InfoFlora
[10] GBIF, Flouve odorante (Anthoxanthum odoratum L. Consulté le 7 mai 2024.
[11] Photo de Lolium temulentum L. Yoan Martin.

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