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Le cynorhodon: cueillette et utilisations

Plantes sauvages dans cet article: 

Thèmes: 
Michaël Berthoud
/
1 février 2019

Le cynorhodon est un de nos fruits sauvages préférés car on peut l’utiliser en cuisine sauvage de nombreuses manières originales. Sucré et au gout umami subtil, c’est également une bombe de nutriment comme la vitamine C. Autant de raisons de l’apprécier et de le récolter, avec parcimonie…

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CYNORHODON
Gratte-cul
Nom latin: Rosa canina
Famille: rosacées
Cueillette: dès août, puis tout l’hiver jusqu’au pourrissement du fruit
Abondance: il faut en laisser pour la faune!
Milieux: haies et lisières
Floraison: juin
Altitude: jusqu’à 1600m

EDIT 10.2022: Nous avons mis à jour la partie concernant la température de cuisson du cynorhodon.

Comment reconnaître les cynorhodons?

Le cynorhodon est le fruit de l’églantier, le rosier sauvage. Reconnaissable par ses rameaux à aiguilles, ses feuilles composées et ses fleurs, les roses. C’est un arbuste commun de nos lisières et de nos haies. On le trouve en plaine ainsi qu’en montagne jusqu’à 1600m d’altitude. Il en existe de nombreuses espèces dont la plus commune est le rosier des chiens, mais leur distinction est ardue et sera laissée aux botanistes. Ne vous inquiétez pas, tous leurs fruits sont comestibles, ainsi que ceux des innombrables variétés ornementales.

Le fruit est en réalité un faux-fruit. Les fruits à proprement parler sont les “graines” que l’on trouve lorsqu’on l’ouvre. Ils sont rouges, gros, de forme variable selon les espèces et possèdent une pulpe comestible à l’intérieur. Ouvrez-le et vous y trouverez une multitude de petits poils appelés vulgairement « gratte-cul ». Ce nom rappelle les irritations qu’ils procurent au derrière de celui qui en consomme sans avoir pris le temps de les enlever. Ils sont effectivement irritants pour toutes les muqueuses du système digestif.

Usages traditionnels du cynorhodon

Le cynorhodon est utilisé traditionnellement comme diurétique et astringent ainsi que pour lutter contre le scorbut, une maladie qui pouvait causer un déchaussement des dents, voire la mort. Il est donc indiqué dans les cas de diarrhées, nausées, crampes d’estomac, inflammation des reins, asthénie, cure de printemps… [6]

Ses propriétés antiscorbutiques proviennent de sa forte teneur en vitamine C. Le sirop de ce fruit a été utilisé jusqu’à la 2e guerre mondiale en Angleterre. Effectivement, les importations de fruits et légumes étant restreintes, ce sirop était donné aux enfants pour éviter des carences en vitamines [7].

Usages modernes du cynorhodon: si riche en vitamine C!

Le cynorhodon est un des fruits qui possède le plus de vitamines C au monde (30–1300 mg/100 g)[1]. Elles sont situées principalement dans sa peau [6]. Il contient également de la vitamine B1 et B2 en quantité ainsi que du potassium, des pigments (flavonoïdes) et des tannins [2].

L’usage traditionnel de ce fruit est confirmé par des études récentes qui démontrent ses propriétés: il est anti-inflammatoire, antioxydant, anti-mutagène [3], vitaminisant, astringent, cholagogue, cholérétique, diurétique, anti-laxatif, antioxydant…[4] De plus, Orhan et al. [5] lui trouvent des propriétés antidiabétiques. Bref, cela fait beaucoup pour un seul fruit!

Sachez que selon une étude parue en 2013, les cynorhodons qui poussent en altitude sont plus riches en vitamines C! [8] Normal quand on sais que cette vitamine est antioxydante. L’arbuste situé en montagne en produira plus pour se protéger du rayonnement UV plus important.

Bref, c’est un fruit aux propriétés variées dont la consommation vous apportera de nombreux nutriments essentiels!

Cueillette et conservation des cynorhodons

La cueillette de cynorhodon se fait en général à partir du mois d’octobre, lorsque les fruits sont devenus mous grâce aux gelées. Mais il est possible de les consommer bien avant, dès le mois de septembre voire fin août.

Récolte de cynorhodons. Cueilleurs Sauvages.
Cueillette de cynorhodons.

Récolter les cynorhodons quand ils sont durs

Si vous récoltez les fruits avant les gelées, les cynorhodons sont durs. Vous pouvez donc facilement les ouvrir en deux et enlever sans difficulté les graines et les poils urticants. Dégustez-les en pleine nature, c’est délicieux!

De retour à la maison, faites cela pour toute votre récolte. Coupez en deux, et enlevez les poils avec une petite cuiller à moka. Cela prend du temps… beaucoup de temps. Mais vous serez récompensé, car vous aurez un produit magnifique, d’un goût exquis et délicieux. Vous pouvez les stocker au congélateur et les réutiliser plus tard.

Cette manière de faire vous permettra de le confire et les servir en accompagnement d’une chasse par exemple.

Récolter les cynorhodons quand ils sont mous

Après quelques semaines de murissement sur la plante, les fruits deviennent mous et plus sucrés. Contrairement à ce que l’on dit souvent, cela commence avant les gelées, même si elles favorisent le processus. Cela dépends aussi des espèces, la plus commune, Rosa canina, muris assez tardivement.

À déguster en pleine nature:

  1. Pressez dessus pour faire sortie la pulpe sans les poils.
  2. Dégustez!

Un seul de ces fruits vous donne votre dose quotidienne en vitamine C! Alors, pourquoi s’en priver?

Là aussi, vous pouvez les congeler pour les réutiliser plus tard ou en faire une préparation le jour même. Comme ils sont mous, vous ne pourrez pas les ouvrir à la main. Ils sont en général cuits et passés à travers un filtre pour enlever les poils. C’est ainsi que vous préparerez d’excellentes gelées, sirop et autres sauces fait maison.

Cueillette durable des cynorhodons

J’ai pu observer que ces fruits ne sont pas nécessairement les plus appréciés par les oiseaux, contrairement au sorbier des oiseleurs (du moins autour de chez moi).

Néanmoins, j’applique toujours les principes de la cueillette durable et ne prélève jamais plus de 10–20% des fruits d’un arbre. Et n’oubliez pas que c’est une ressource de nourriture pour la faune en hiver!

Conservation des cynorhodons

Comme déjà dit, les fruits sauvages se conservent bien au congélateur. Si vous les avez récoltés durs, ils vont probablement se ramollir, mais pas forcément.

Le séchage est aussi une bonne manière de les conserver. C’est une méthode qui sera surtout utilisée pour en préparer une infusion.

Pour sécher les cynorhodons, vous avez deux possibilités. La première consiste à les récolter durs (ou les congeler pour qu’ils le soient), puis vous les coupez en deux et enlevez tous les poils et fruits à l’intérieur avant de les sécher. Ils seront donc tout propres, mais cela prend du temps… beaucoup de temps.

Soit vous les coupez en deux et laissez tout ce qu’il y a à l’intérieur. Vous devrez par contre filtrer votre infusion avec une passoire très fine pour filtrer les poils. C’est la solution la plus simple.

Mais personnellement, je ne le fais pas car je les préfère tellement dans leur stade bien mûr et juteux!

Récolte de cynorhodons. Cueilleurs Sauvages.

Utilisations culinaires du cynorhodon

Le cynorhodon s’utilise en préparations médicinales ou culinaires, ou les deux c’est encore mieux! Si vous les avez déjà coupés et nettoyés, c’est bingo, vous pouvez les utiliser maintenant facilement. Sinon il faudra de toute manière les travailler au corps pour extraire les poils.

Différentes options sont possibles:

  • presse-purée et filtre à café permanent
  • moulin à légumes
  • pressage et filtration à travers un tissus

Au début, je les pressais à travers un presse-purée, sorte de gros presse-ail. C’est rapide et très efficace! La maille doit être inférieure à 5 min pour que les poils ne passent pas. Cet outil vous rendra de nombreux services pour préparer d’autres plantes médicinales. Cependant, comme la purée est chaude et visqueuse, elle a tendance à sortir brutalement par les côtés, ce qui a pour conséquence de teindre les murs de votre cuisine de rouge. De plus, le cylindre n’est pas grand ce qui prend du temps si l’on a de grandes quantités.

Le plus commode, je pense, reste donc le passe-vite ou moulin à légumes, qui permet d’obtenir une pulpe de cynorhodons facilement et rapidement et en grande quantité. La méthode consiste a cuire les cynorhodons à feu doux dans le même volume d’eau, de les écraser, puis de les passer au moulin à légumes (avec la maille la plus fine). La plupart des poils seront également filtrés, il en restera quelques-uns, mais ce n’est pas très grave.

La pulpe de cynorhodons est une véritable merveille! Vous pouvez y rajouter un peu d’huile d’olive, de sel et de poivre et vous obtenez une “sauce tomate” de cynorhodon! Délicieuse sur une pizza par exemple! Ou vous pouvez l’utiliser classiquement pour préparer un sirop ou une gelée. Cette pulpe se conserve dans de petits sacs plastique au congélateur durant 1 à 2 ans.

Vous pouvez également mettre les fruits à macérer dans de l’eau, mixer et macérer durant 1 ou 2 nuits. Après filtration, le liquide obtenu est une bombe gustative qui servira de base à une limonade, un kéfir ou un vin sauvage.

Voici quelques exemples d’utilisation des cynorhodons:

A partir d’une macération ou d’une infusion

  • Sirop
  • Vin de fruits
  • Limonade

A partir d’une pulpe extraite au presse-purée

  • Gelée
  • Confiture
  • Sauce salée: pizzas, pâtes (comme une sauce tomatte)…
  • Sauce sucrée: coulis, panacotta
  • Macarons

A partir de fruits durs

Ces images sont tirées de mon livre “54 Plantes sauvages comestibles de Suisse romande et de France voisine”.

Sirop de cynorhodons pour l’hiver
Voici ma recette du sirop de cynorhodons au goût délicat et aux propriétés médicinales utiles en hiver.
Voir la recette
Sirop de cynorhodons
Cynorhodons confits
Cette recette de cynorhodons confits ravira petits et grands. Ils sont parfaits en accompagnement de la chasse, ou tout simplement à déguster comme des bonbons.
Voir la recette
Cynorhodons confits

À quelle température faut-il cuire les cynorhodons?

C’est une question bien débattue et il n’est pas facile de s’y retrouver. On mentionne souvent qu’au-delà de 60°C, la vitamine C est détruite par la chaleur. La stabilité de cette vitamine dépendrait également du pH, de la quantité d’oxygène et des autres molécules présentes dans le milieu. J’ai finalement trouvé une étude sur la stabilité de la vitamine C du nectar des cynorhodons chauffée à différentes températures (70-80-90-95°C).

Le graphique ci-dessous montre que les pires températures sont 90 et 95°C. Selon les auteurs de cette étude, la température idéale de cuisson des cynorhodons est de 70°C [9]. Si vous chauffez moins, l’extraction de la vitamine C risque de ne pas être optimale, si vous chauffez plus, elle sera dégradée…

Quantité de vitamine C extraite à partir de cynorhodons sec dans le temps, chauffé à 70°C, 80°C, 90°C et 95°C. Kadakal et al 2017.

Du coup, pendant longtemps j’ai cru qu’il fallait chauffer à 70°C, jusqu’à ce que je relise cette étude pour notre projet de formation en ligne. Et je me suis aperçu que pour préparer leur nectar, les auteurs ont utilisé du fruit sec! D’ailleurs, lorsqu’on regarde leur graphique, on s’aperçoit qu’on est autour des 7mg de vitamine C par litre! Rien à voir au ~1000mg par 100gr du fruit frais!

En conclusion

Si on utilise le fruit sec, il va falloir chauffer à 70°C pour extraire le peu de vitamine C qu’il reste. Mais pour une préparation riche en vitamine C, on va éviter de chauffer à plus de 60°C, l’idéal étant une macération à froid. Pour ce faire, mélanger la même quantité d’eau que de fruits, passer au mixer et laisser macérer durant une nuit avant de filtrer.

Ce qu’il faut également noter est que l’action du cynorhodon n’est pas seulement liée à la vitamine C, mais à tout un florilège d’autres principes actifs comme les flavonoïdes antioxydants.

Vous avez déjà cuisiné les cynorhodons? Nous aimerons bien savoir comment, alors n’hésitez pas à partager vos astuces de cuisine en commentaire!

54 plantes sauvages comestibles de Suisse romande et France voisine. Se nourrir des cadeaux de la nature. Michaël Berthoud

54 plantes sauvages comestibles

Note : 5 sur 5.

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Vous y découvrirez de nombreuses astuces de cueillette et des recettes pour tous les goûts!

Références
[1] Ziegler SJ1Meier BSticher O. Fast and Selective Assay of l-Ascorbic Acid in Rose Hips by RP-HPLC Coupled with Electrochemical and/or Spectrophotometric Detection. Planta Med. 1986 Oct;(5):383-7. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17345347
[2] FikretDemiraMusaÖzcanb. Chemical and technological properties of rose (Rosa caninaL.) fruits grown wild in Turkey. Journal of Food Engineering, Volume 47, Issue 4, March 2001, Pages 333-336 https://linkinghub.elsevier.com/retrieve/pii/S0260877400001291
[3] Kilicgun H, Dehen A. In vitro antioxidant effect of Rosa canina in different antioxidant test systems. Phcog Res. 2009;1:417–420.
[4] Aresenescu A. Pharmacognostical research on the species Rosa canina L. (in Romanian): UMF Cluj-Napoca; 2008.
[5] Orhan N, Aslan M, Hosbas S, Deliorman O. Antidiabetic effect and antioxidant potential of Rosa canina fruits. Phcog Mag. 2009;5:309–315. doi: 10.4103/0973–1296.58151. http://www.phcog.com/article.asp?issn=0973–1296;year=2009;volume=5;issue=20;spage=309;epage=315;aulast=Orhan
[8]  Roman I, Stănilă A, Stănilă S. Bioactive compounds and antioxidant activity of Rosa canina L. biotypes from spontaneous flora of TransylvaniaChem Cent J. 2013;7(1):73. Published 2013 Apr 23. doi:10.1186/1752-153X-7-73 https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3668991/
[6] Paul-Victor Fournier, Dictionnaire des plantes médicinales et vénéneuses de France, Omnibus.
[7] Plantes médicinales essentielles, Simmonds, Howes, Irving, Editions Ulmer, 2018.
[9] Kadakal, C., Duman, T., & Ekinci, R. (2017). Thermal degradation kinetics of ascorbic acid, thiamine and riboflavin in rosehip (Rosa canina L) nectar. Food Science and Technology, (AHEAD), 0-0.
– Image de couverture: http://alexisartscience.blogspot.com/

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